Référendum Burkinabè: Blaise conte fleurette à l’électeur potentiel

13 mai 2014

Référendum Burkinabè: Blaise conte fleurette à l’électeur potentiel

Blaise-compaoré-2010, commons-wikimedia
Blaise-compaoré-2010, commons-wikimedia

Blaise se tâte et sonde le pays réel. Oubliées les crises ouest africaines. Le Mali, le MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad) qui a pris ses quartiers à Ouagadougou, ne sont plus des priorités du médiateur en chef de la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest). L’enlèvement de plus de deux cents lycéennes par la secte islamique Boko Haram, est ce qu’il en a entendu parler, le libérateur d’otages européens pris par les djihadistes d’Al Qaeda au Maghreb islamique (AQMI) ? Le Président du Faso est hors réseau pour toute question qui n’est pas nationale. En ce moment, Blaise est président du Faso à plein temps et à son agenda il n’y a qu’une seule question : comment modifier avec succès la constitution en son article 37 pour rester au pouvoir ? L’option préférentielle du référendum qu’il a émise n’est pas en question. Le problème c’est comment convoquer le peuple à son plébiscite. Aussi a-t-il pris sur lui-même la résolution de rendre sur le terrain, là il tâte les bulletins de vote des populations, les inhale pour en connaitre la senteur et la couleur. Après les mesures sociales, il faut investir les campagnes, battre campagne.
Personne à Ouagadougou. Jusqu’à quand Blaise Compaoré va-t-il continuer ses tournées d’inspection ? Est-ce que les regroupements organisés par ses adeptes ont valeur de bulletin de vote pour le référendum? Le président ne se leurre t-il pas en n’oubliant le risque majeur de fracture sociale, de clivage du pays, de retour des démons de la division que va susciter la convocation du référendum ? Le pays qui est déjà vilipendé à l’international par des hommes d’affaires aigris, ne sera-t-il pas encore à l’index avec ce dernier coup de force ? Blaise Compaoré parie t-il sur un silence coupable de ses alliés occidentaux ? Que fera l’opposition ? Ce sont là des questions légitimes que se posent les Burkinabè, le peuple des hommes intègres, depuis un moment.

Nous savons tous que le parti-Etat est en campagne. Depuis le conseil national du CDP, la campagne politique pour le référendum a pris de l’ampleur, et son régime s’est intensifié. Ce ne sont plus les ministres et le premier d’entre eux. Blaise Compaoré lui-même est entré dans la danse et se bat comme un beau diable pour séduire et gagner le cœur des hommes et femmes du Burkina. Depuis la journée du paysan à l’est du pays il a multiplié les arrêts sur sa route pour conter fleurette à l’électeur potentiel. Et une des haltes qu’il a le plus appréciée est celle de Zorgho, bourgade d’origine des ascendants de Rock Marc Christian, un de ses anciens fidèles compagnons qui crie sur tous les toits aujourd’hui avec d’autres anciens , qu’il est temps pour Blaise de passer la main.

Ayant vécu cela comme un coup de poignard dans le dos de la part d’un ami, il s’est fait un plaisir d’aller sur « ses terres, dans son fief » faire le coq et chercher des voix qui se porteraient sur son nom, pour un oui au pouvoir à vie. Il a essayé en tout cas, de leur parler dans une langue que tous à Zorgho comprennent – le mooré.
Après plusieurs campagnes électorales, même au temps de la révolution et du Front populaire, Blaise Compaoré qui n’a jamais été à l’aise avec les mots (plus habile avec les armes, et dégainant plus vite que les autres) s’est mis au mooré et a tenu meeting en mooré. Cela témoigne que les temps sont durs pour le capitaine Compaoré et son clan. Le coup des Rock, Salif et Simon ce sont des choses qu’il aurait réglé à sa manière. En d’autres temps, un de ses anciens numéros deux, Oumarou Clément Ouédraogo a eu l’idée de le quitter, et l’histoire ne s’est pas bien terminée pour lui. Blaise Compaoré, semble être comme ses amants qu’on ne quitte pas, qui « aime pour son bien à soi ».

Il nous prouve qu’il aime le pouvoir de manière possessive, qu’il veut le garder que pour lui et lui seul et qu’il l’aime pour ce qu’il lui apporte à lui et à son clan. Oumarou Clément Ouédraogo pour revenir à la fin de son histoire a pris une grenade dans sa voiture en plein centre de Ouagadougou et ses assassins courent toujours. Il est vrai qu’après les crimes odieux de Sapouy après le sacrifice du journaliste Norbert Zongo, les différends politiques ne peuvent plus trouver leur épilogue dans un bain de sang comme celui qui a conduit au coup d’Etat de 1987, où Blaise Compaoré s’est séparé de son ami et frère d’armes Thomas Sankara. C’est une bonne chose qu’il ait compris l’importance de la parole et qu’il ait le désir de se faire comprendre en parlant dans la langue de ses interlocuteurs. Que le médiateur des crises ouest africaines retrouvent les chemins du Burkina est une bonne chose.

Tout ne s’est pas bien passé à Tenkodogo

C’est ainsi qu’il a délocalisé le conseil des ministres à Bagré pour que le projet phare de l’émergence prenne la lumière et que sur les routes il rencontre des partisans du référendum. Mais à Tenkodogo sur la belle photographie de famille avec des pancartes pour le référendum, se sont invités des « moutons noirs » avec des pancartes contre la révision de l’article 37 de la constitution. Cela faisait désordre et Alain Yoda a négocié pour que chacun replie ses banderoles et que personne ne lance un slogan et ne réclame quelque chose.

S’il fallait encore une preuve pour se convaincre des dangers de ce référendum, le chef de l’Etat l’a eu à Tenkodogo. Il était en à la fin de semaine passée (du 3 au 10) à Koudougou pour voir ce que le fils de Monsieur Maurice peut faire pour lui et les derniers de ses fidèles. Koudougou la ville rebelle qu’il n’a jamais conquise, ne lui a pas été cette fois encore vraiment soumise. Avec de l’argent on peut beaucoup, mais son long règne lui aura enseigné que les meetings monstres, les meetings du siècle n’empêchent pas les soulèvements populaires.

Le comportement de Blaise est anxiogène depuis sa crispation sur son refus de l’alternance.
Toutes les autorités morales et coutumières lui ont déconseillé de franchir le pas qui va conduire le pays dans le chaos de la division. Aussi ses voyages lui ont-ils montré que le pays est toujours aussi pauvre et misérable, malgré ce qu’il a fait, que la jeunesse majorité de la population est sans emploi.

Ses dernières mesures sociales ne sont pas une solution à ce problème. A Fada N’Gourma, capitale régionale de l’est, où il s’est rendu pour la journée du paysan, il n’y a pas d’écoles, les enfants sont dans des écoles sous paillote alors que les premières pluies ont commencé. L’opinion internationale ne le suivra pas. Le secrétaire d’Etat américain John Kerry a déjà donné le ton à Kinshasha et il espère qu’à Ouagadougou, on l’a bien compris. L’opposition burkinabè qui souffre toujours pour avoir été malmené par Blaise et ses lieutenants semble tenir le bon bout avec les manifestations, elle semble avoir gagné en sens tactique et stratégique et attendait sur la question du référendum avant de dévoiler ses batteries. Lui qui a toujours, par votre silence poussez ses adversaires à la faute.

Blaise Compaoré, conseil

on ne vous recommandera jamais assez de vous plongez dans des lectures spirituelles avant de vous décider à franchir le pas pour ce fameux référendum que vos affidés du CDP réclament. «Craindre le Seigneur, voilà la sagesse ! S’écarter du mal, voilà l’intelligence ! ». Restez chez vous au frais à Kossyam, ou retirez vous dans une de vos résidences à l’intérieur du pays et plongez vous dans le livre de la Sagesse et méditez-le. Si vous avez des questions, le cardinal Philippe Ouédraogo, le pasteur Yaméogo et Karambiri pourront vous répondre. Ne partez pas sur une mauvaise note, déjà que vous n’avez pas eu une entrée heureuse et triomphale.

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